Michel fait le grand tour de la Mercantour
Publié le 22 Juin 2016
Par Michel Quéré
Peut-être la plus belle cyclo, certainement une des plus dures.
Il fallait vraiment avoir envie de la faire… : 4h30 de route seul dans la voiture, le team était à l’Ardéchoise ce we, une météo des plus incertaine, mais le résultat est là. Ce fut une journée mémorable.
D’abord le parcours : 175 km pour 4600m de dénivelé… Au programme les Cols de Cayolle (2326m) avec 15km à 7,1%, la Cime de la Bonette (2802m) avec 24 km à 6,7% et enfin le col de la Couillole (1678m) avec 16,7km à 7,3%.
Les paysages sont somptueux et la Cime de la Bonette n’a rien à envier au Galibier.
J'avais réservé une chambre dans un gite à 10 km de Guillaumes le long du col où je fais la connaissance de la famille Defaye: un jeune de l'équipe de France qui est en convalescence après une fracture du genou.
Toute la nuit il va pleuvoir à seaux...
350 inscrits, 300 partants et pas mal qui vont choisir le petit parcours arrivés à Barcelonette tant les conditions étaient compliquées.
Pour réussir ce genre d’épreuve il faut bien penser à plusieurs éléments : alimentation, vêtements et stratégie de course.
Pour l’alimentation j’ai pris un maximum de gels (8 au total) , 2 bananes et 2 bidons énergétiques car je suis en totale autonomie. Je n’ai pas la chance d’avoir une voiture suiveuse comme beaucoup de coureurs en tête de la course… Ceci me permettra de ne jamais m’arrêter car je n’ai pas bu la totalité de mes 2 bidons (vu la météo). A si une seule fois pour ramasser un gant que j’avais laissé tomber.
Ensuite les vêtements : les conditions étant hivernales en haut des cols (il a neigé la veille) j’opte pour des sur-chaussures d’hiver, un bonnet léger, des chaussettes chaudes, 4 couches sur moi (2 sous-vêtements (une première), un maillot court et un coupe-vent) et une veste ultra-light en réserve en cas de pluie. Bien sûr des manchettes et des gants d’hiver et même un bandana. Ces choix vont s’avérer judicieux par la suite.
Au niveau stratégie de course comme on passe les 4000m de dénivelé je décide de faire la course à mon rythme. Ne pas essayer de suivre les groupes dans les cols. Economiser l’énergie au maximum…
Heureuse surprise au petit matin : il a arrêté de pleuvoir et la route est même sèche. Quelques rayons de soleil au programme, ce qui ne gâche rien. La course démarre prudemment et je reste avec les premiers jusqu’au premières rampes du Col de Cayolle. Ensuite je gère (ne pas dépasser les 170 pulsations) et je rattrape ainsi régulièrement des groupes qui étaient partis plus rapidement (comme d'habitude...).
En haut il ne fait pas très chaud, la neige est présente sur les bords de la route. Je bascule avec un autre coureur et on fait la descente ensemble. Elle est très longue et même avec des gants le froid est présent. A Barcelonnette on roule en fond de vallée pendant 15km avant de ré-attaquer le col de la Bonette. Le temps est toujours correct sans pluie et les nuages sont très hauts. Le temps va se dégrader pendant la montée mais on restera au sec et hors des nuages, une chance pour profiter du panorama. La fin du col est somptueuse, très enneigée. Je vois Thomas Becarud (Team Scott) et un de ses amis devant à environ 5mn. Ce sera mon objectif de les rattraper. La route restera sèche jusqu’au sommet. Il n'y fera pas très chaud (juste au dessus de zéro). Pour l'anecdote la cime (2802m) était fermée pour cause de chute de neige et on n'a donc emprunté "que" le col (2730m). mais que c'est beau là-haut...
Par contre toute la descente du col de la Bonette se fera avec une route complètement détrempée après un gros orage, super dangereuse, agrémentée de gravier sur la fin et même de festin de mouton… On démarrera même la descente dans une brume qui se lève de la route. Il est clair qu’on n’a pas battu des records dans la descente, avec en plus le froid au mains…
En bas un gars de l’armée de terre et un de ses potes me rattrapent (ils s’étaient arrêtés en haut du col pour changer de vêtements avec une voiture) et je les suis dans la vallée (ils vont me tirer pendant un bon bout de temps). On récupère enfin Thomas et 2 autres gars et on attaque donc ensuite le dernier col à 6. C’est maintenant la chaleur qui nous attend pendant une bonne dizaine de kilomètres : plein soleil le long des falaises. Les 2 avions de chasse nous déposent et ensuite au train je lâche les 3 autres du groupe. Je comprends alors que pour la première fois dans une cyclo de plus de 4000m je n’exploserai pas dans le dernier col. Car je maintiens les pulsations vers 170 et je me sens assez bien. Le pied! Mais ce dernier col est bien difficile surtout par sa longueur. Ensuite les 10 derniers kilomètres de la course se feront sur une route détrempée de retour suite à un gros orage, mais seulement sous une petite pluie. Je réussis à rattraper et lâcher deux autres coureurs dans la dernière côte du parcours (un vrai régal quand ca répond...) et je termine la course juste avant un gros orage. Il ne me restera plus qu’à descendre ensuite dans la vallée jusqu’à Guillaumes, village du départ.
Des images plein les yeux et super content d'avoir bien géré (pour la première fois) ce type de cyclo ultra dure. Bon il est vrai que j'ai mis une demi-heure à arrêter de trembler pendant le repas tant j'avais épuisé le bonhomme.
Mais cette épreuve mérite le (long) détour. C'est bien mieux que la Marmotte... Je n'ose imaginer le tableau avec un beau ciel bleu sur le Mercantour!